Transparence sur les fonds frontaliers cantonaux (proposition #31 tenue) (jeudi, 15 septembre 2011)

Dans les 31 propositions de la campagne des élections cantonales, la dernière et non la moindre consistait à introduire une certaine transparence dans l'utilisation des fonds frontaliers cantonaux.

Pour rappel, cas inhabituel, les frontaliers genevois ne paient pas d'impôts sur le revenu en France comme les frontaliers vaudois, ils les paient au canton de Genève. Depuis 1973 Genève rétrocède une toute petite partie de cet impôt aux partenaires français : 3,5% de la masse salariale. Un taux qui n'a jamais varié alors que les taux d'imposition à Genève ont considérablement augmenté, et les frontaliers ont augmenté de tranche de revenu. Au total, Genève conserve après rétrocession plus de 400 millions d'euros : une somme à peine inférieure à la totalité du budget du département de la Haute-Savoie !?!?! L'accord de rétrocession genevois suscite la jalousie de tous les autres cantons helvétiques. Il est si favorable à Genève que le canton le paie très cher dans la péréquation intercantonale. Tôt ou tard les 8% d'électeurs genevois qui résident dans le Genevois français ne se contenteront plus de liste annexe alibi comme pour les élections fédérales, ils exigeront que ces 8% du budget cantonal soient affectés aux infrastructures transfrontalières et en particulier aux déficits de transport en commun. Tôt ou tard les entreprises genevoises exigeront que ces 400 millions qu'elles prélèvent sur les salaires de leurs collaborateurs qui vivent en France servent à financer les déficits de transports pour les amener sur leur lieu de travail. Cessons de nous bercer d'illusion : les montants des déficits de transports en commun transfrontaliers dépassent de loin les capacités financières des collectivités francaises : et il n'est éthiquement pas défendable de faire porter cette charge sur les salariés en euros et les entreprises françaises ! Le paradoxe c'est que si Genève reversait l'intégralité de ces 400 millions à des projets pertinents sur territoire français, Genève le récupérerait pratiquement en intégralité au travers d'une baisse de sa péréquation intercantonale. Je pense même que le jour où Genève cessera de réaliser un "profit fiscal" sur l'expulsion de ses habitants qu'elle expulse faute de logements, il y aura soudainement une très forte volonté politique de loger les Genevois à Genève ! Nous avons du travail à faire sur ce sujet là dans l'intérêt de tous les habitants de l'agglo.

Toujours est il qu'une part de cet impôt est reversé aux collectivités françaises : 76% à la Haute-Savoie et 24% à l'Ain.

Mardi soir, j'ai réuni les maires du canton pour leur présenter une analyse de l'utilisation des fonds frontaliers sur le canton de St Julien au cours des 10 dernières années. Cette analyse fait ressortir que ces fonds cantonaux ont permis de financer des projets municipaux mais qu'aujourd'hui nous avons des urgences cantonales : logements pour les salariés en euros, mobilité, préservation des espaces naturels et agricoles. Il est urgent de réorienter les moyens publics sur les priorités des habitants. Certaines de nos très très très belles réalisations municipales suscitent un grand étonnement tant des élus du reste du département que des élus genevois. "C'est cossu" me disait il y a quelques mois un Conseiller d'Etat genevois après avoir eu l'amabilité de chercher un terme diplomatique. Les Conseillers Généraux du Sud du département ne s'embrassent pas de tant de diplomatie lorsqu'ils constatent certaines dépenses somptuaires dans certaines communes qui nous décrédibilisent tous. Nous devons désormais être crédibles dans l'utilisation pertinente de ces ressources publiques : tant vis à vis de nos partenaires genevois que vis à vis des Haut Savoyards.

Evidément une telle décision de réorienter les fonds cantonaux sur des projets cantonaux va placer certaines communes devant les choix difficiles auxquelles toutes les communes de France doivent faire face : projet vs impôts. Mais je concois le mandat de Conseiller Général comme un mandat au service des habitants plutôt qu'au service des communes. Et les priorités des habitants du canton sont manifestement de pouvoir se loger, de pouvoir circuler et de préserver le cadre de vie.

En vous présentant aujourd'hui cette analyse en toute transparence, je tiens ma 31ième promesse.. mais ne tient pas la 30ième qui consistait à tenir les engagements en cours de mon prédécesseur. Lorsque j'ai fait cette promesse, j'ignorai que la moitié du budget 2011 avait déjà été voté juste avant les élections. J'ignorais que les engagements pris par mon prédécesseur couvraient environ la moitié des ressources du mandat. Tenir les engagements déjà pris aurait conduit à renoncer à tous mes propres engagements de campagne : ce n'est manifestement pas une position tenable. Je regrette de ne pouvoir tenir pleinement ma 30ième promesse.

A la sortie de la réunion, un maire disait assez justement "Nous avons mangé notre pain blanc". Au vu de l'énormité des déficits publics je me dis que nous avons aussi mangé le pain blanc de nos successeurs et de leurs successeurs.

Présentation fonds frontaliers cantonaux version powerpoint 2003.ppt

Lettre aux conseillers municipaux version word 2003.doc

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