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mardi, 30 mars 2010

Le fossé croissant entre la politique et la jeunesse

Plusieurs articles ces derniers jours ont souligné l'abstentionnisme massif dans les banlieues. Des analystes ont à juste titre analysé que cette exclusion politique est plus inquiétante que les violences de 2005 parce qu'elle traduit une marginalisation sociale toujours plus forte.

Ce que ces analystes ont en revanche manqué, c'est que cette exclusion politique et sociale de la jeunesse de France n'est pas spécifique aux banlieues. Elle est plus visible dans les banlieues parce que la part de la jeunesse dans la population y est plus élevée. Mais on observe cette même exclusion politique et sociale de la jeunesse à Saint-Julien-en-Genevois (Haute-Savoie) - commune parmi les plus aisées de France.

Le graphe ci-dessous montre le nombre de votants par classe d'âge aux régionales de 2010 dans la commune de Saint-Julien. En blanc les abstentionnistes, en noir les personnes qui ont voté aux deux tours et en gris ceux qui n'ont voté qu'a un seul tour. Ce graphe montre l'abstentionnisme de masse des jeunes mais aussi leur tourisme politique : ils sont plus nombreux à avoir voté à un seul tour qu'à avoir voté aux deux tours consciencieusement.

Nbre d'électeurs par classe d age.JPG

Chacun doit assumer sa part de responsabilité dans ce divorce entre la politique et la jeunesse : la politique s'éloigne de la jeunesse aussi parce que la jeunesse s'éloigne de la politique - et réciproquement. Aux municipales, il était désespérant de constater que les jeunes mamans de Saint Julien ont aussi peu voté que dans toutes les autres communes bien qu'on ait fait de leur préoccupation de l'accueil de la petite enfance un thème clef de notre projet municipal.

Chez les Saint Juliénois de 20 à 25 ans, seulement 11% ont voté aux deux tours. 15% ont manqué l'un des deux tours et 74% ont manqué les deux tours !!! Aucune élection ne traite aussi spécifiquement des sujets importants pour les jeunes : emploi, trains régionaux et formation sont les compétences principales de la région. A l'opposé on peut se demander pourquoi le taux de participation est si élevé chez les électeurs âgés de plus de 70 ans dont la plupart ne sont plus très concernés ni par les trains, ni par les lycées, ni par les formations professionnelles, ni par la politique de l'emploi.  

Nos démocraties perdent leur jeunesse. Les jeunes encore plus que les autres, ne croient pas à la politique, à la démocratie.. et presque en l'avenir du pays. Dans nos democraties vieillissantes la jeunesse est minoritaire. Les jeunes constatent que les règles démocratiques ne permettent pas de prendre en compte leurs préoccupations minoritaires : crise du logement, chômage de masse des jeunes, insuffisance de l'accueil de la petite enfance, défense des avantages acquis au détriment des jeunes qui n'ont aucun avantage, crise environnementale, crise morale, dettes publiques... passent après la question récurrente et pour eux dérisoire de l'insécurité, de la burqa ou de l'identité nationale. Notre société a du mal à faire une place à sa jeunesse... ou seulement aux « fils de » Higelin, Chedid, Drucker, Sarkozy, Gainsbourg... Scrutin après scrutin la majorité la plus âgée lui impose des choix de société qui ne sont pas les siens.

A ce sujet, les dernières présidentielles sont caricaturales : Ce sont les plus de 50 ans et particulièrement les retraités qui ont accordé une majorité au Président de la République et son thème du « travailler plus pour gagner plus ». Une règle de vie imposée en particulier par les retraités inactifs à des actifs qui au contraire recherchent un équilibre de vie entre vie professionnelle et vie privée.

Nous autres, plus très jeunes qui avons la politique pour passion sommes des ovnis déjà plus très représentatifs de notre génération. Nous sommes déjà dans la moitié la plus âgée de la population mais nous sommes considérés comme des jouvenceaux impubères et peu crédibles dans les milieux politiques. Avec les familles qui se délitent, nous sommes pourtant l'un de ces dernier fils qui relient encore le pays à sa jeunesse.

Les jeunes ont du mal à se reconnaître dans des références idéologiques périmées et n'ont plus de cadre de pensée pour comprendre le monde et le changer. Ils doutent à juste titre de la capacité du politique à changer les choses. Ils constatent que les politiques sont trop soumises à l'économie et à la finance : la crise du logement qui perdure dans le Genevois et l'incapacité à réguler la finance sont de nouvelles preuves de l'impuissance du politique.

Lors des élections municipales l'âge médian des votants était de 50 ans. Deux ans plus tard l'âge median des votants aux régionales est de 54 ans. L'âge median des votants augmente plus vite que le temps qui passe !!!

La jeunesse de France se mobilise sur des élections à enjeu lisibles et claires - ce que n'ont pas été les dernières régionales. On peut espérer que les prochaines présidentielles le soient. Les jeunes ne votent pas sur des cadres idéologiques périmés mais sur des thèmes forts et clairs. Les jeunes enfin auront besoin de preuves que la politique peut imposer la volonté populaire sur les contraintes économiques et financières. C'est sur des réponses concrètes à leurs préoccupations et des résultats visibles que l'on pourra remobiliser la jeunesse à participer à la construction de l'avenir du pays.